11 octobre Pourquoi pas des primaires...
Le PS a inauguré en France des primaires « citoyennes », les électeurs pouvant exprimer leur choix sur le représentant du PS lors de la campagne présidentielle. C'est une initiative intéressante, et bien des gens ont suivi les débats. Bien sûr, on peut pointer les limites d'un tel processus :
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au sein d'un même parti, il n'y a pas d'opposition profonde sur le contenu, les candidats devant être les garants d'un projet consensuel déjà rédigé
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d'ailleurs, les candidats n'ont pas véritablement débattu, et ont même tout fait pour préserver une unité de façade, qui est restée plus forte que l'envie d'agresser les autres
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à partir de là, sur quoi pouvaient-ils se différencier ? Certains ont tout fait pour ne pas s'engager sur des questions épineuses, et pour préserver un électorat jugé allergique aux convictions bien assénées
Cependant, ces débats ont aussi permis à cet électorat de commencer à percevoir que la politique nationale n'est pas limitée à la langue de bois pratiquée depuis plus de 4 ans, à ces fausses évidences répétées continuellement sur la nécessité de casser les services publics et de se serrer toujours plus la ceinture à cause d'une crise dont personne n'est responsable, à les entendre, mais dont les classes populaires et moyennes doivent faire les frais.
Oui, l'accord sur un programme du PS était acquis par les candidats, oui, ils essayaient de séduire les électeurs en jouant de leurs egos..., mais n'est-ce pas là l'essence de cette élection présidentielle telle que l'a conçue de Gaulle, et qui est complètement inadaptée à la réalité présente ?
Et Montebourg n'est-il pas le chantre d'une 6ème république, où la fonction présidentielle serait totalement changée ? De fait, nous avons entendu parler de cette possibilité, et d'autres idées fortes. En effet, Montebourg, en particulier, arrive à poser des problématiques rarement entendues sur les ondes, telles que la mise sous tutelle des banques, la question d'une dose de protectionnisme, de production plus localisée... Et ces problèmes atteignent les discours de tous les autres. De même, on sent que les questions des retraites, de l'éducation nationale, de l'emploi, du logement etc..., seront de nouveau ouvertes. Et toutes ces questions intéressent les gens, dans leur quotidien.
Bien sûr, cette élection telle qu'elle existe encore, implique une personnalisation des projets. On entend « dès que je serai président, je ferai... », mais le pouvoir ne pourra plus s'exercer comme ce que nous connaissons avec Sarkozy.
Au sein même du PS, nous savons qu'il y aura des pressions de la part des diverses sensibilités entendues lors de ces primaires. Et il y aura des pressions plus fortes encore venant d'une gauche plus radicale.
On pouvait d'ailleurs rêver d'une sorte de « primaires » pour cette gauche radicale. Après tout, la quasi auto-désignation de Mélenchon a été un peu surprenante et choquante. L'enfermement autistique des partis trotskystes n'en est plus, hélas, à nous étonner.
D'une façon différente, l'appel à des candidatures « médiatiques » pour des primaires limitées chez les Verts a été aussi surprenante et choquante.
La politique, à l'échelle de la nation, peut évoluer, et on peut tous participer à cette évolution, par nos engagements, nos pressions de groupes, le pouvoir du vote, des manifestations de toutes sortes... Mais c'est encore à l'échelon local, municipal, que nous pouvons vraiment être acteurs du changement, sans pour autant ignorer l'échelon supérieur.
Cependant, puisque nous vivons au sein d'une nation, nous nous devons de ne pas être indifférents aux tentatives de certains acteurs qui briguent des responsabilités nationales, tentatives pour changer la donne, tout en continuant à faire entendre nos voix pour une ligne politique qui ne soit pas esclave des économies libérales, qui, au contraire, impose peu à peu sa loi à ces directives économiques et en change la logique, qui privilégie un vrai partage des richesses et qui mette la solidarité au-dessus de toute autre considération.
Alors, les primaires socialistes ont été l'occasion de débats politiques toujours prisés par bien des français. Des primaires de la gauche radicale auraient été l'occasion de développer les thèmes qui nous sont chers. De vraies primaires chez les Verts auraient permis que leurs différentes sensibilités s'expriment au grand jour, l'écart étant tellement grand en leur sein, entre des tendances libérales et des tendances beaucoup plus proches de la gauche radicale.
Au lieu de cela, on ne perçoit, chez ceux qui n'ont pas débattu, que des caricatures, des petites phrases, des petits règlements de comptes... au détriment d'échanges sur le fond.
Même si cette première expérience a montré des limites, elle a eu le mérite de se dérouler au grand jour, et a gêné le discours de la droite, qui s'est montrée ridicule dans ses réactions.
Même si je n'ai pas voulu voter à ces primaires, considérant que c'était aux électeurs potentiels du PS de se déterminer, je respecte et comprends la position de Martine Arveuf, et de bien d'autres, qui ont voulu peser sur un choix qui engagera les possibilités de pression et de discussion avec une gauche gouvernementale dont on ne pourra pas se désintéresser, et avec laquelle il faudra toujours négocier pour imposer peu à peu une autre politique.
Jacques Ménochet