25 février - éducation politique

Publié le par dominique dieterlé

Aujourd'hui, interviewée par le journal Ouest France qui désire faire un portrait personnel de chacune des "têtes de liste" à Concarneau.
Questions pour rendre le politique plus humain ...  ou "pipolisation" ? 

L'une des questions consiste à enquêter sur le déclencheur politique du parcours de chacun. 
Il me semble tout d'abord que sans être soi même étiqueté, ou professionalisé, ou en charge de responsabilités électives, on peut dire que tout engagement au sens collectif du terme est de nature politique. Dans le bon  et vrai sens du terme qui veut dire "se préoccuper de la vie sociale,et y peser en conformité avec ses idées, ou ses valeurs.
 

J'avais écrit le texte ci dessous pour les gens du collectif "défi à Gauche" en mai 2007.
Comme premier souvenir d'une prise de conscience politique, deux mois avant Mai 68...
 

ET VOUS c'était quoi, et quand, votre "déclencheur" ?

Pour moi, c'était en mars 1968
En ce temps là le maire d'Issy les Moulineaux ne s'appelait pas André Santini, les Hauts de Seine s'appelaient encore la Seine, et jusqu'au bord du fleuve, dans le bas Moulineaux, on trouvait des usines, des cours, des  immeubles, désolés. En ce temps là Issy les Moulineaux n'était pas une extension de la banlieue chic, Boulogne, Neuilly, St Cloud.

J'étais entrée dans les maisons avec mon carnet d'agent recenseur, un boulot d'étudiante que je croyais facile pour un mois de voyage dans l'intimité du quartier.
Chez nous pourtant - HLM poisseux déjà ruiné à peine occupé - s'entendaient aussi des langues inconnues, qu'on ne devait pas parler. Ma mère disait : "ce n'est pas convenable d'aller jouer dans la rue avec n'importe qui. Fais tes devoirs."

J'ai reçu de plein fouet à 18 ans les secrets de la misère et de la peur : réfugiés, sans papiers,  arrières-cours de marchands de sommeil, hôtels crasseux où les pensionnaires à peine dénombrés s'entassaient dans des caves où l'on ne m'a pas invitée à rentrer.
Un seul paté de maisons, 4 rues, 2 ou 300 appartements... Et combien de nationalités, d'histoires , d'errances, de douleurs, d'inquiétudes ?
"Ne remplis pas ma fiche, Madame, je n'ai pas de papiers"...
"J'ai quitté mon pays trop vite, je n'ai pas eu le temps de prendre mes diplômes"...

Puis, je revois toujours la page du registre où s'étalait le silence anonyme des travailleurs de Renault Billancourt, couchés sous cette seule étiquette, que le tôlier arabe, venu d'une autre Afrique, avait collé sur l'exil : NOIRS - NOIRS - NOIRS.
Trois chambres. Trois fois.

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