8 novembre : Hôpitaux
Voici les points forts de son intervention :
D'abord un rappel de l'objectif qui a présidé à la naissance de la sécurité sociale en 1945 par le Conseil National de la Résistance : la SOLIDARITE.
Depuis les années 60, une volonté politique n'a cessé d'être mise en oeuvre par les gouvernements successifs pour faire glisser ce concept de "solidarité" vers une idée d' "assurance sociale" par le biais de la main mise de l'Etat sur le "magot de la sécu", ( B.Teper rappelle que ce budget est supérieur en France de 25 % à celui de l'Etat, tous ministères confondus) puis par la session au secteur privé des sommes ainsi récoltées pour faire du profit sur le dos de la Santé publique - et à l'aide des cotisations salariales des travailleurs dont ceux ci perdent la gestion au fur et à mesures des réformes successives.
Cette session se fait par l'augmentation des franchises et des soins non remboursés ainsi que par l'accroissement de la part des remboursements prise en charge par les assurances volontaires, mises en concurrence avec les mutuelles qui s'embarquent alors dans la même politique de "profit" .
D'autre part : plus les franchises, ou les dépassements autorisés d'honoraires augmentent , moins les assurés sociaux les plus pauvres se soignent à temps, et donc au bout du compte , plus cela coute cher à la collectivité !
Quelle est la différence entre la solidarité de la sécu et l'assurance privée ? la solidarité partage les risques à égalité entre tous les cotisants, une assurance choisit des "clients" à moindre risque pour faire des bénéfices sur les sommes des cotisations.
En ce qui concerne les hôpitaux , la même logique de privatisation est à l'oeuvre : aux hôpitaux publics les actes peu rémunérateurs , les pathologies lourdes, les malades à problèmes, et a contrario, cession aux cliniques privées des secteurs qui rapportent le plus comme la petite chirurgie par exemple !
La politique de numerus clausus a également entrainé la désertification médicale de secteurs entiers du territoire national, ce qui conduit les patients à recourir aux urgences publiques dans des cas qui relèvent de la seule médecine générale, d'où la saturation de ces services.
Enfin la loi Bachelot qui va être étudiée en fin d'année 2008 donnerait tous les pouvoirs sur la gestion des hôpitaux et de la répartition des établissements de soin qui, rappelons le, sont gérés avec ces mêmes cotisations qui appartiennent aux salariés (y compris le secteur privé subventionné par la Sécu), à un directeur d'ARS ( agence régionale de santé), sorte de super préfet , représentant de l'état au niveau régional, qui n'aura aucun compte à rendre de ses décisions, ni à la population concernée, ni à ses représentants élus !
Nous devons ainsi faire oeuvre de "pédagogie" auprès des populations concernées par les restructurations hospitalières pour bien faire comprendre à tous que le problème des fermetures de services est une logique de destruction volontaire, concertée, et globale de notre système de santé déjà mis à mal par 40 années d'atteintes répétées.
Le discours mobilisateur de Bernard Teper
propos recueillis par Ronan Larvor
Bernard Teper, un économiste de la santé, fondateur d'Attac et militant laïque, était jeudi à Quimper, à l'invitation des défenseurs des hôpitaux de proximité et des services publics. Son discours a dynamisé les Cornouaillais.
Bernard Teper, que représentez-vous ?
Je suis secrétaire national de l'Union des familles laïques et coordonnateur du Collectif national contre les franchises médicales, pour l'accès aux soins et pour une sécurité sociale solidaire. Ce collectif regroupe 78 associations. Nous travaillons avec la coordination des comités de défense des hôpitaux de proximité' et la convergence nationale de défense et de promotion des services publics. Tout ce mouvement prend de l'ampleur depuis environ quatre ans.
Pour quelles raisons ?
C'est à ce moment-là que le processus de privatisation et de marchandisation du système de santé et de remboursement des soins est apparu clairement. Ceux qui ont lancé cette politique sont les mêmes que ceux qui ont précipité la crise financière actuelle. L'enjeu est énorme vu les sommes concernées.: le budget de l'État, c'est moins de 300 milliards d'euros par an, celui de la sécurité sociale toutes branches confondues plus de 400 milliards.
Vous êtes quand même optimistes pour l'avenir ?
Oui, car la logique à l'œuvre depuis 25 ans va changer forcément, même si les intérêts financiers résistent le plus longtemps possible. Nous sommes dans un mouvement mondial. Aux États-Unis, dans certaines couches de la population l'espérance de vie commence à diminuer. L'élection d'Obama repose en grande partie sur les inégalités sociales et d'accès aux soins.
Les changements politiques récents vers la gauche en Amérique du Sud reposent aussi sur les problèmes de santé et de sécurité sociale. En Europe, on voit par contre le processus continuer en Pologne, en Hollande.
Et en France ?
La question de la santé était sanctuarisée. En gros, on accepte que son voisin qui a les moyens aille en vacances aux Bahamas quand on ne peut pas y aller soi-même. Par contre, on n'accepte pas qu'il puisse se soigner si on ne peut plus le faire soi-même. Or on apprend que 14% des Français ont renoncé à des soins pour des raisons financières. Ça ne passe pas. Il faut remettre la notion de solidarité en tête et non la rentabilité.
Quel est le message de vos conférences?
Je replace le vécu finistérien dans la logique générale. Il n'y a pas un problème de l'hôpital de Carhaix ou de Concarneau, mais une politique à changer. Cela se fera, sinon nous risquons de voire augmenter les taux de mortalité, maternelle et baisser l'espérance de vie, même en France, pour certaines catégories de population. Je suis optimiste, car il n'y a pas d'autres solutions que le changement de logique.